Un manifeste et un collectif contre l’épandage aérien en Guadeloupe

Un collectif contre l’épandage aérien s’est constitué . Il appelle à  un rassemblement ce samedi 4 ao ût à  Trois Rivière, à  9h au centre bourg, devant l’église. Un collectif composé de syndicats, d’associations, de politiques et de membres de la société civile pourra-t-il agir ici, contre une décision de la préfecture. Ailleurs des préfets n’ont pas signé des dérogations autorisant l’épandage. Affaire à  suivre. Des préfets ailleurs sur le territoire français n’ont pas signé les dérogations autorisant l’épandage aérien, jugé dangereux et illégal, sauf dérogation. Notamment dans le Lot. Une pétition de 10 000 signatures recueillies en cinq jours, et la mobilisation de la population a conduit la préfecture à  choisir une autre alternative. En Guadeloupe la pétition identique a recueilli autant de signatures , mais la préfecture n’a écouté pour l’instant, que la voix des planteurs qui défendent en priorité leurs intérêts et leurs chiffres d’affaire, quel qu’en soit le co ût environnemental, sanitaire et social, comme ce fut le cas pour la chlordécone. Cela peut-il durer ?

Sur BFM TV, la ministre de l’écologie Delphine Batho a souhaité publiquement que le principe des dérogations soit stoppé. Le cas est intéressant. Que va-t-il se passer en Guadeloupe ? Un collectif contre l’épandage s’organise, la population se mobilise, le ministre de l’Outre-mer, Victorin Lurel, guadeloupéen, s’est déclaré plutôt en faveur de l’épandage et les planteurs s’accrochent à  leur dérogation. La marge va finir par être étroite pour la préfecture qui devra trancher entre la pression des planteurs et celle de la société civile et d’une opinion publique en train de se constituer.

Nous publions ci-dessous le manifeste du collectif

Manifeste du collectif contre l’épandage

APRES LA CATASTROPHE DE LA CHLORDECONE,

ARRETONS L’EPANDAGE AERIEN DE PESTICIDES !

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Un nouveau scandale sanitaire et environnemental touche notre petit pays : la poursuite de l’épandage aérien de pesticides dangereux pour la santé humaine et l’environnement, sur une surface de 2 000 hectares 10 fois dans l’année, soit une surface de 20 000 hectares/an équivalente à  28 000 terrains de foot!

En dépit de tous les avis défavorables des associations de protection de l’Environnement, de scientifiques, de médecins, du Parc national de la Guadeloupe , de plusieurs milliers de citoyens (près de 10 000 signataires d’une pétition numérique sur avaaz.org) et malgré l’écrasante majorité de refus exprimés lors de la consultation publique, l’Etat a satisfait entièrement la demande du Groupement de Producteurs de Bananes de Guadeloupe en dérogeant à  l’interdiction légale d’épandage aériens de pesticides.

Les molécules qui seront pulvérisées sous forme de brouillard, sont pour la plupart classées dangereuses pour l’environnement en raison de leur très forte toxicité pour les organismes aquatiques, les animaux terrestres, et leur caractère de polluants persistants. Mais si elles le sont pour les animaux, elles le sont aussi forcément pour les hommes. En effet, les fiches de données de sécurité des produits indiquent qu’ils sont également très nocifs pour la santé humaine par contact ou inhalation, pouvant pour certains entrainer de graves lésions pulmonaires voire la mort.

Ces polluants ont également montré des effets cancérogènes (provoquent des cancers), toxiques pour le développement et la reproduction (réduisent la fertilité, engendrent des malformations foetales …) et perturbateurs endocriniens (entrainent des troubles hormonaux).

Nous, associations, syndicats, acteurs de la société civile, citoyens, partis politiques, regroupés au sein du  » Collectif contre l’épandage aérien de pesticides en Guadeloupe « :

Rappelons les fortes préoccupations exprimées par les scientifiques qui y voient une pratique extrêmement dommageable pour la flore fongique indigène, la faune terrestre dont plusieurs espèces endémiques sont classées mondialement menacées par l’UICN et la faune aquatique (crevettes, poissons).Surtout sur une petite île comme la nôtre, les pollutions constituent une menace grave pour la biodiversité des écosystèmes terrestres, aquatiques et marins et concourent à  son effondrement.

Nous affirmons donc notre opposition à  l’épandage aérien de pesticides, pratique interdite par la loi du fait précisément de sa dangerosité et de la contamination globale et durable de tous les milieux et des nappes phréatiques, qu’elle entraine.

Nous nous insurgeons contre la décision de l’Etat ignorant purement et simplement les avis éclairés qui s’appuient sur le classement de ces molécules par l’Agence Américaine de Protection de l’Environnement et sur de récentes études confirmant leurs caractères cancérogènes et toxiques pour la reproduction et le développement. Ces fongicides sont également incriminés dans la détérioration des capacités cognitives. Il est donc tout à  fait faux de prétendre que la nocivité des produits n’est pas prouvée. Il est très grave de mentir aux Guadeloupéens à  ce sujet !

-Nous sommes scandalisés que l’Etat ne prenne pas en considération les risques sanitaires réels encourus par les personnes les plus exposées et les plus vulnérables à  cette pollution (travailleurs de la banane, riverains, femmes enceintes, nourrissons, enfants…) D’autant plus, que ces populations ont déjà  subi de multiples expositions passées à  des cocktails de polluants organiques persistants (divers organochlorés).

-Nous sommes indignés que l’Etat justifie la satisfaction de cette dérogation par des prétextes économiques , les mêmes qui ont justifié l’empoisonnement à  la Chlordécone, cédant une fois de plus au lobbying des grands planteurs alors que les petits planteurs ne reçoivent rien pour la diversification. En réalité, il s’agit de préserver la rentabilité d’une filière déjà  injustement et excessivement subventionnée, comme l’a souligné un récent rapport de la Cour des comptes (2011).

-Nous exigeons par conséquent, que l’Etat applique positivement le Principe de précaution et se ravise en interdisant définitivement l’épandage aérien de ces polluants

-Nous demandons aux autorités compétentes de faire évaluer l’impact et les co ûts sur la santé et sur l’environnement des épandages aériens et terrestres de tous les polluants persistants qui ont été réalisés des décennies durant et sur des milliers d’hectares en Guadeloupe.

-Nous implorons tous les acteurs à  lever tous les freins au développement d’une agriculture extensive, diversifiée, biologique, respectueuse de la santé humaine et de la biodiversité dont nous dépendons très étroitement. Compte tenu de la petitesse de notre territoire et des précédents sanitaires et environnementaux catastrophiques,  » Développer une agriculture sans pesticides sur tout le territoire devient donc indispensable  » ; c’est la conclusion du Rapport d’évaluation des plans d’action Chlordécone aux Antilles (octobre 2011). Il s’agit donc de repenser entièrement le développement positif de la filière banane.

Enfin, nous appelons la population à  rester mobilisée contre l’épandage aérien en participant activement aux prochaines actions de terrain proposées par le collectif.

Ensemble, nous mettrons fin aux pratiques dangereuses pour la santé publique et pour l’Environnement. Celles qui hypothèquent le développement durable et harmonieux de notre Archipel et qui mettent en danger l’avenir de nos enfants. Si nous aimons notre pays, si la Guadeloupe sé tan nou, nous sommes responsables de la bonne conservation de notre territoire.

LE COLLECTIF CONTRE L’EPANDAGE AERIEN DE PESTICIDE EN GUADELOUPE

Premiers signataires :
Institut Rémi Nainsouta ; SOS environnement ; Vernature ; Guadeloupe nature environnement ; ACED ; ASFA ; SAVE ; Le KARE ; Café-débat social club. ACEDn Vernature, l’Asfa, Amazona, Nature Kulture 971, la Gaiac, la FSU.

Combat ouvrier ; Caraïbe écologie les verts

Auteur/autrice : perspektives

Didier Levreau, créateur en 2010 du site Perspektives, 10 ans d'existence à ce jour