Guadeloupe: il faut en finir avec des postures destructrices pour l’avenir de l’archipel

Dans l’article que nous publions, Patricia Braflan-Trobo, sociologue guadeloupéenne, porte un propos sans langue de bois sur la situation sociale en Guadeloupe.  » Il faut combattre » dit-elle « les postures de certains syndiqués qui disent non à tout, mais veulent parfois jouer les éminences grises avec les cadres guadeloupéens. »
Elle rapproche les évènements récents à l’hôpital de Pointe-à-Pitre, avec une affaire plus ancienne, celle du départ de Christian Jolivière, un ancien directeur guadeloupéen du CHU qui après une longue grève a quitté son poste et son pays. Patricia Braflan-Trobo pose une question fondamentale pour la Guadeloupe : l’engagement syndical ou politique sont-ils fait pour construire, améliorer, développer un pays ou bien pour s’opposer sans fin à un état français qui serait la cause de tous les maux.
La sociologue observe également ce fait apparemment paradoxal : les cadres guadeloupéen noirs, autochtones, rencontrent plus de difficultés dans leurs relations professionnelles avec leurs compatriotes que les cadres blancs venus de l’hexagone. En somme dit-elle, il faut  » décoloniser certains réflexes », mais décoloniser de part et d’autre, de droite à gauche et de haut en bas.

D.L

Christian Jolivière pour ceux qui ne s’en rappellent pas c’est ce directeur guadeloupéen du CHU, qui suite à une longue grève menée par l’UTS-UGTG, avec à sa tête Gaby Clavier, avait quitté la Guadeloupe et son poste de directeur. Ce fait est resté dans la mémoire collective guadeloupéenne comme l’illustration parfaite du fait que nèg vé pa nèg dirijé yo et de la violence que des syndicats guadeloupéens peuvent déployer contre des cadres guadeloupéens.

Cela a pour conséquences de faire peur à beaucoup de diplômés ou cadres guadeloupéens au point qu’ils ne veulent pas de postes de managers en Guadeloupe ou qu’ils refusent de revenir en Guadeloupe pour y occuper des postes de managers du fait du sort réservé aux cadres guadeloupéens en Guadeloupe par les syndicats.

J’ai pu apporter une réponse à ce phénomène à travers cet article :

http://patriciabraflantrobo.blogspot.com/2021/11/un-privilege-de-fonctionnaire.html

Néanmoins on peut difficilement ne pas remarquer que ce qui se passe au CHU avec l’actuel directeur ressemble beaucoup à ce qui s’est passé avec Christian Jolivière. Au-delà de la lutte syndicale, tout à fait légitime je le précise, il y a dans les actes et les propos, une haine, un mépris et une violence qui tiendrait plus du règlement compte, de la mise en coupe réglée, de l’asservissement.

Comme s’il s’agissait de montrer au directeur guadeloupéen que sa réussite ne dépendra que du bon vouloir du syndicat, qu’il ne sera légitime que lorsque le syndicat l’aura décidé et qu’il serait un traitre, un nèg a blan, un vendu, … alors qu’il s’agit d’un cadre de la fonction publique comme tous les autres. Je ne reviendrai pas sur le mal qu’assigner les Noirs à leur couleur de peau peut faire à la construction des personnes de ladite couleur de peau.

Tout le monde a noté que cette violence est exercée uniquement contre le directeur du CHU qui est Noir et guadeloupéen alors que dans la majorité des autres établissements de santé, où les directions sont blanches et venues de l’hexagone, les suspensions seraient moins « graves » apparemment que celles du CHU et la violence ne semble pas pouvoir s’exprimer comme elle s’exprime au CHU dans ces établissements….

Dire, comme je l’ai entendu, que le secrétaire de l’UTS-UGTG au CHU se verrait comme le mâle dominant sur « l’habitation CHU », et que tout autre mâle serait à terrasser est assez inquiétant vu la noblesse de l’action syndicale.

Cela aurait pu paraitre anecdotique si en tant que manager je n’avais pas eu à subir ces pratiques de la part de mes ex camarades de l’UGTG. Naturellement j’ai tenu tête et j’ai eu droit au pire de la part de certains. Je ne cesserai jamais de dire et répéter que l’UGTG reste un syndicat nécessaire en Guadeloupe. Les pères fondateurs et mères fondatrices ne s’étaient pas trompés en fondant cette organisation

Face à ces positions destructrices pour le futur de la Guadeloupe, il faut combattre ces postures. Certains de ces syndiqués qui disent non à tout dans les entreprises où administrations, veulent parfois jouer les éminences grises des cadres guadeloupéens, tout en affirmant qu’ils ne valident aucune décision des directions car ils refusent d’être dans la cogestion… Allez comprendre… Il y a une volonté de certains d’asservir les cadres guadeloupéens Noirs, de les terroriser.

Il ne faut pas laisser passer ces dérives. Apporter la contradiction contre elles est impératif pour la construction de notre pays et pour que les générations qui arrivent n’aient pas peur de se positionner sur n’importe quel poste à responsabilité. Si demain, la Guadeloupe est autonome ou indépendante, comme certains disent le souhaiter « dans leur bouche », on ne va pas importer des cadres.

Dans quel pays indépendant de la Caraïbes il y a cette violence contre les cadres autochtones ? Il faut décoloniser certains réflexes, décoloniser la lutte syndicale et la penser aussi en termes de construction d’un pays, d’une nation et pas uniquement en opposition à l’état français. D’autant que beaucoup des syndicalistes ou leurs proches sympathisants sont des employés de cet état français, ou y ont fait toute leur carrière et sont en train de percevoir de lui, à juste titre, leur retraite.

Les directeurs blancs qui achètent la paix sociale à n’importe quel prix pas apa akaz a yo sont parmi les pires fléaux de la Guadeloupe. Ils sont généralement très appréciés de syndiqués et syndicalistes qui disent vouloir conduire la Guadeloupe à son indépendance. Il y a incontestablement un problème de cohérence dans toutes ces actions et attitudes.

Pour la construction de la Guadeloupe, de ses enfants, de son avenir, pour l’estime de soi des guadeloupéens Noirs, pour que notre jeunesse embrasse sans peur, sans crainte, toutes les fonctions de direction et de management en Guadeloupe, un Christian Jolivière dans l’histoire de la Guadeloupe est suffisant.

L’actuel directeur du CHU et tous les autres cadres guadeloupéens Noirs ne doivent pas se laisser décourager ou intimider et ne doivent pas bénékaké !

3 réflexions sur « Guadeloupe: il faut en finir avec des postures destructrices pour l’avenir de l’archipel »

  1. ET j’ai envie d’ajouter à mon commentaire … si le collectif se transforme en mouvement politique, quelle est la place à l’ANG dans l’histoire.. Ce nouveau parti a fait un score honorable aux régionales et semble porté par des personnes assez lucides sur la situation du pays, mais je crois partagés au sein du mouvement sur la question du vaccin. L’irrationnalité des antivax n’y fait pas l’unanimité. Enfin je crois.

  2. Je viens de lire que le collectif veut se transformer en mouvement politique dans l’espoir de capter un électorat en Guadeloupe peut-être. Ok, mais qu’arriverait-il si des gens comme ceux qui ont agressé le directeur de l’hopital arrivaient à un quelconque pouvoir ?
    Et je dis cela en étant de ceux qui considérent que le statut de département est aberrant et que l’archipel doit s’émanciper d’une manière ou d’une autre, mais pas avec ces gens …

  3. Je partage entièrement l’analyse de Mme Patricia BRAFLAN-TROBO relative à la situation que nous vivons. Le discours ainsi que la posture des dirigeants syndicaux du  » kolektif… » ont installé dans notre pays un climat d’ insécurité, de méfiance .. au point que certains dépriment et cela devient inquiétant.
    La manipulation des esprits et des consciences fonctionne et à ce niveau de responsabilité , je m’interroge sur l’implication des avocats..Merci Patricia

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