Epandage aérien: l’incroyable obstination du ministère de l’Agriculture

Une note interne de la DGAL ( direction générale de l’alimentation du ministère de l’agriculture) laisse ouverte la possibilité de reprise de l’épandage aérien de pesticides en Guadeloupe et sans doute ailleurs. Les planteurs ont vendu les avions mais le ministère de l’Agriculture fait du zéle. Etonnant. Jean-Marie Abillon nous livre son indignation.

 Après la décision de suspension, par le Conseil d’Etat en date du 06 mai 2014, de l’arrêté du ministère de l’Agriculture du 23 décembre 2013 relatif aux conditions d’épandage par voie aérienne de produits phytosanitaires, on pouvait raisonnablement penser, après les nombreux camouflets infligés à  ce ministère par des associations de Guadeloupe et de Martinique, qu’on était définitivement débarrassé de ce mode de traitement présentant de graves dangers pour la santé humaine et la biodiversité.

Eh bien NON ! Dans son obstination (criminelle ?) à  passer outre aux décisions de justice, la DGAL (Direction Générale de l’Alimentation) de ce ministère vient d’émettre une note interne d’information technique en date du 20 mai, dont le contenu est ahurissant :

 » Les décisions notifiées avant le 6 mai 2014 peuvent juridiquement continuer à  être exécutées.

– Les décisions notifiées le 6 mai 2014 ne peuvent pas être exécutées. En effet, aux termes du premier alinéa de l’article R. 522-13 du code de justice administrative  » l’ordonnance (du juge des référés] prend effet à  partir du jour o๠la partie qui doit s’y conformer en reçoit notification.

En conséquence :

– considérant que les dérogations prises sur les bases de l’arrêté de 2013 antérieurement au 6 mai 2014, restent valides,

– considérant par ailleurs que l’instruction de demandes de dérogation sur les bases de l’arrêté de 2011 est possible, du fait de la suspension de l’arrêté de 2013 qui l’abrogeait,je vous demande, dans le contexte actuel et dans l’attente de la publication d’un nouvel arrêté :

– de n’autoriser les épandages que pour les décisions notifiées avant le 6 mai 2014,

– de n’autoriser aucun autre épandage, sauf cas d’extrême urgence et absolue nécessité (dans ce cas, les demandes de dérogation devraient être instruites selon les modalités de l’arrêté de 2011).  »

Rappelons que :

– L’arrêté AM/MA/2013, présenté en catimini en ao ût 2013, et publié en décembre 2013 (cosigné par les ministères de la santé et de l’écologie, ce qui est un comble !), élargit dans certains domaines (banane des Antilles) les conditions de dérogation à  l’interdiction de l’épandage aérien,

– Les arrêtés préfectoraux de Guadeloupe de 2012 et 2013 portant dérogation à  l’interdiction de l’épandage aérien ont été systématiquement suspendus/annulés par le Tribunal Administratif de Basse-Terre.

– Jamais les bananiers ne se sont aussi bien portés depuis ces décisions, ce qui prouve à  l’évidence que l’épandage aérien n’est pas indispensable.

Arguties ministériels contredisant les décisions de justice


L’action en référé du ministère de l’Agriculture, demandant au CE d’annuler la décision du TA/BT de 2013, a été jugée non recevable.

Le ministère se moque sans aucun scrupule de la justice, et se lance dans des arguties qui ne sont pas à  son honneur !

Combien de décisions de justices, locales et au plus haut niveau national, faudra-t-il encore pour que l’évidence pénètre enfin l’esprit brumeux de notre administration ? Pendant encore combien de temps notre administration sera-t-elle aux ordres des lobbyistes de tout poil, pour lesquels les intérêts économiques immédiats supplantent ceux de la santé et de l’environnement ?

La tragédie de la chlordécone, véritable Tchernobyl dans ses conséquences et dans sa durée (des siècles !), n’est-elle pas suffisante ?

Auteur/autrice : perspektives

Didier Levreau, créateur en 2010 du site Perspektives, 10 ans d'existence à ce jour